Anne-Claire Bonneau,
portrait d’une œnologue nouvelle génération

Œnologue chez PELLENC depuis plus de 4 ans, Anne-Claire Bonneau accompagne ses clients viticulteurs dans l’élaboration de leurs vins.

Passionnée par son métier, elle a bien voulu nous faire partager quelques-uns de ses secrets de « fabrication ».

Quelles sont les grandes tendances en vinification aujourd’hui ?

Il y a la vinification des vins bio mais aussi des vins zéro résidu de pesticides (ZRP) et sans sulfites qui gagnent du terrain. On estime que dans moins de 10 ans, le sans sulfites représentera une fraction importante des vinifications. Pourtant le soufre est très utile. Il permet de bloquer la fermentation alcoolique et d’éviter le développement de micro-organismes nuisibles, notamment les bactéries ascétiques.

Notre challenge consiste donc à réduire ces sulfites tout en garantissant une bonne préservation du vin contre le vieillissement prématuré. On a aujourd’hui des technologies et des process qui nous permettent de faire ce type de vins. Le principe général, c’est qu’il faut que ça fermente très rapidement pour éviter toute déviation.

 

Le bois œnologique a plutôt la cote ces dernières années, non ?

Les notes boisées et les saveurs marquées restent un classique très demandé. Le bois œnologique est aussi de plus en plus apprécié pour la sucrosité qu’il peut conférer, sans masquer la complexité endogène du vin. Pour assurer la reproductibilité des profils et l’originalité des produits, on peut jouer sur le bois utilisé mais aussi sur le process. Chez Pellenc, on a le Smart Oak, un outil de pilotage du boisage des vins qui permet de boiser entre 7 et 10 jours alors qu’habituellement, il faut 2 mois minimum.

 

Quel est l’impact du changement climatique sur la vinification des vins ?

À Saint-Émilion par exemple, la date de récolte a avancé de 15 jours en 26 ans et même de 26 jours en Alsace. En 30 ans, les vins du Languedoc ont gagné près de 3°. Les vins deviennent moins acides et leur pH augmente. L’enjeu est de limiter au maximum l’augmentation de la concentration d’alcool dans les vins. Pour cela, on utilise différentes techniques. Par exemple, la flash détente permet de récolter le raisin moins mûr et donc de réduire le degré d’alcool. Et en même temps, on gomme les caractères végétaux.

La technologie est-elle indispensable pour réussir son vin aujourd’hui ?

Il en faut c’est évident. Mais la technologie ne doit pas se sentir à la dégustation. Surtout que les vins typés traditionnels ont la cote. Alors on mixe de plus en plus la technique de la flash détente avec de la vinification traditionnelle. On obtient ainsi un vin typé traditionnel et sans défauts.

Est-ce que les nouveaux matériels s’apprivoisent facilement ?

La technologie est globalement plus facile à utiliser aujourd’hui. Une fois que les process sont bien en place et qu’on a bien programmé les machines, on est plutôt sur du « touch and go ». Le matériel est également plus rapide à nettoyer. Une journée de vendange est longue, alors si on doit nettoyer pendant 6 heures les machines, ça devient compliqué ! On s’est aussi adapté aux petites caves. On a du matériel de flash détente pour le traitement du raisin rouge avec un débit de 5 à 8 tonnes par heure, soit le débit approximatif d’une machine à vendanger. C’est du matériel mobile qui peut être utilisé pendant les vendanges et aller de cave en cave.

Sur quoi portent vos travaux de recherche aujourd’hui ?

Pour faire face au réchauffement climatique, on voit se développer de nouveaux cépages plus résistants mais qui peuvent avoir des goûts moins agréables. Les œnologues essaient d’adapter les techniques pour que les qualités organoleptiques restent identiques ou en tout cas pour gommer les éventuels défauts.

La technologie nous permet également d’améliorer la finesse des vins. Mais attention, on ne fera jamais d’un âne un cheval de course ! Nos recherches portent également sur l’aspect environnemental et le développement durable. On essaie de rendre les machines moins gourmandes en énergie que ce soit en électricité ou en eau.

Quelles sont les qualités indispensables d’un bon œnologue selon vous ?

Notre travail est d’écouter attentivement et notre maître-mot est « s’adapter ». On propose des solutions, des process mais on doit toujours rester dans une approche collaborative avec nos clients. Il faut être capable de s’adapter à leurs méthodes de récolte, d’approvisionnement, etc. 

En fonction du vin qu’ils souhaitent obtenir, on les aide à choisir le bon matériel, à arbitrer entre rapidité et qualité. Si on veut par exemple travailler sur la rapidité on va proposer un pressurage en 1,5 ou 2 heures. Si on veut davantage travailler sur la qualité on va plutôt pressurer en 3 heures. Tout dépend des impératifs de la cave !